La numérisation de notre société, la lutte contre le changement climatique et la préservation de l’environnement ont transformé le marché. Selon l’institut Grand View Research, le marché de la ville intelligente atteignait 568 milliards de dollars en 20131. Cette économie, basée sur l’IoT, devrait continuer de croître de manière spectaculaire. Toujours d’après Grand View Research, en 2020 la smart city pèserait 1,4 billions de dollars et 2,57 billions de dollars en 20252. Toutefois, cet enthousiasme « techno-écologique » ne pourrait-il pas tomber dans la spéculation financière et connaître le même sort que la bulle internet dans les années 1990/2000 ?
De plus, la perspective de nouveaux marchés dans le domaine de l’IoT et de l’environnement a incité les entreprises à innover et les collectivités à investir dans la ville de demain. Pour l’International Data Corporation (IDC), ce sont près de 80 milliards de dollars dépensés en 2018 dans la mise en place de stratégies de ville intelligente ; cela devrait atteindre 135 milliards de dollars en 20213. A eux deux, la Chine et les États-Unis couvrent plus de la moitié de ces dépenses stratégiques3. Mais ces investissements seront-ils suffisants pour couvrir les besoins de la transition énergétique ? Probablement pas.
La Smart City corrélée à la finance ?
En effet, la transition énergétique implique d’énormes moyens financiers pour permettre aux entreprises de trouver des solutions durables, fiables et collectives. Les projets de la smart city ont besoin d’investisseurs privés, d’une « finance verte » ! Les économistes Abdeldjellil Bouzidi, Alain Grandjean et Mireille Martini dans leur étude « Régulation financière et urgence climatique » créée en 2017 défendent cette idée : « Il est vital pour nos économies de réconcilier rapidement les modes de financement avec les objectifs climatiques. (…) II est nécessaire et urgent de réinvestir le champ prudentiel pour assurer le financement de l’économie verte et de la lutte contre le réchauffement climatique, en y faisant figurer des critères macroéconomiques favorables à l’environnement »4.
C’est dans ce contexte que la Commission Européenne vient d’annoncer le 8 mars 2018 son plan de finance durable. Ce dernier tient compte des critères environnementaux pour les différents investissements. De bonnes augures pour les entreprises se développant dans la smart city, une nécessité pour le vice-président de la commission, Valdis Dombrovskis : « L’écart entre le besoin en financement climat et l’offre actuelle se chiffre à 179 milliards d’euros par an. Cette somme ne pourra être compensée par les seules finances publiques, il faut la participation du secteur financier privé. »5.
Vers une transformation du monde financier ?
Toutefois, s’il est important de rediriger les investisseurs vers les projets durables comme les villes intelligentes, il est nécessaire de contrôler et de réguler cette « finance verte » au risque d’obtenir un marché irrationnel. Ainsi, le plan d’action de l’UE pour financer la croissance durable souhaite transformer les acteurs financiers grâce à une série de mesures : « obliger les acteurs financiers à prendre en compte les questions environnementales dans leurs politiques d’investissement, en définissant des contraintes et des mesures incitatives » ; « définir une “langue commune de la finance durable“ pour classer les produits financiers en fonction de critères climatiques, environnementaux et sociaux » ; « la création d’un standard européen pour les produits financiers verts » ; « la modification de la directive sur les agences de notation afin qu’elles prennent en compte les enjeux de long terme et la soutenabilité »5.
Reste à savoir si ces mesures parviendront à maîtriser le marché financier. Si ce n’est pas le cas, il nous faudra trouver une autre solution face aux enjeux économiques et environnementaux cruciaux.
1Grand View Research, Contenu conçu et proposé par Enedis : https://lemde.fr/2N499Ix
2Grand View Research, « Smart Cities Market Size Worth $2.57 Trillion By 2025”, février 2018 : https://bit.ly/2OQ9lJs
3IDC, « Investments in Technologies Enabling Smart Cities Initiatives Are Forecast to Reach $80 Billion in 2018 », février 2018 : https://bit.ly/2HGMexu
4Abdeldjellil Bouzidi, Alain Grandjean et Mireille Martini : « Régulation financière et urgence climatique : Pour des normes prudentielles et comptables plus vertes », juin 2017 : https://bit.ly/2tkkk31
5RéseauDurable : « Quand l’Union Européenne favorise l’investissement dans l’énergie propre », mars 2018 : https://bit.ly/2C2S0uv